Cartographies de l’ombre. Corps, exil et résistance
Dans une scénographie politique de normalisation de la violence extrême, caractéristique du monde contemporain, les États-nations européens proposent des politiques migratoires élaborées dans le cadre d’un régime de souveraineté qui a le pouvoir d’exposer à la mort les personnes en exil. Pris dans une logique de cruauté, l’étranger est immobilisé dans des espaces d’exception, où la présence spectrale de la mort compose une forme de violence qui s’infiltre dans les mots et les gestes. Ces espaces de déracinement – ces zones grises – ouvrent une blessure dans le corps du monde. À partir des mots d’Ammar, refugié syrien qui a traversé une des zones grises des politiques migratoires européennes – la zone frontalière entre la Biélorussie et la Pologne –, on pensera les cartographies de l’ombre dans lesquelles les corps en exil deviennent des champs de bataille. Entre l’assignation mortifère d’un corps à un espace d’enfermement et la force déchaînée par un corps qui résiste s’opèrent des mouvements qui produisent des réalités inattendues. Ces mouvements – qui témoignent de différentes manières de se confronter au monde – peuvent composer des actions politiques créées par les corps et les gestes des personnes en exil. Il s’agit de trouver l’angle mort des pouvoirs par le mouvement du corps, par les gestes qui redessinent le temps. Dans la diagonale entre le passé et le futur, les corps intègrent et déplacent les représentations. Ils ouvrent, par leurs gestes, un espace-temps de résistance.
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