Langue et migration
Résumé
Nous verrons comment, au travers de l’histoire d’un enfant philippin de 8 ans, la langue a pu jouer un rôle essentiel dans les bouleversements de cette famille mais aussi comment cette langue du pays d’accueil peut être l’instrument principal à un nouvel équilibre familial et filiatif. Paulo s’est construit sur un clivage culturel, une séparation entre deux mondes: celui du «dedans» (la famille) et celui du «dehors» (le pays d’accueil), rentrant continuellement en conflit.
Paulo a du appréhender seul ce monde étranger, source d’angoisse et infligé du poids des angoisses transmises de ses parents. Dans ce contexte Paulo portera la lourde tâche de guider et d’intégrer toute sa famille, du fait que, essentiellement par l’école, il connaît mieux les codes et la langue du pays d’accueil. Il en ressort un bouleversement dans l’ordre des générations qui fait de ces enfants ce que nous avons nommé des «enfants pères». La réactivation œdipienne qui en découle est accompagnée d’un sentiment de toute puissance, accentué par le processus de parentification par le père de Paulo, qui prend sa source dans le sentiment de castration de ce dernier.
Il est apparu que par l’acquisition du français, le père de Paulo a réussi à instaurer un double «pont»: un pont du singulier au collectif, dans ce sens qu’il peut maintenant être pour son fils une figure rassurante et guidante, un guide à la socialisation, une image à laquelle il peut s’identifier, mais aussi un pont culturel, ou devrais-je dire «inter-culturel», dans ce sens que ce père, ayant acquis la langue du pays d’accueil et comprenant de fait beaucoup mieux la culture du pays d’accueil, permet à Paulo de diminuer le clivage culturel qu’il avait mis en place.
Mots-clés
- interculturel
- langue
- clivage culturel
- réactivation œdipienne
- parentification
- surmoi
- pont culturel
- echec scolaire